Vous trouvez la gouvernance projet trop protocolaire ? voire parfois inutile ? Découvrez comment en faire un atout pour piloter vos projets avec succès !
Laissez nous vous raconter une histoire, celle d’une entreprise ambitieuse, qui lance un projet stratégique de refonte de son système de gestion des clients (CRM), visant à transformer l'expérience client et à augmenter les ventes. Pourtant, au bout d'un an, le projet est abandonné, laissant derrière lui des dépassements budgétaires, des équipes démotivées, et une direction frustrée.
Les causes de l'échec ?
- L’absence d’alignement stratégique : aucune instance de gouvernance n’a été mise en place pour définir des objectifs clairs et aligner les priorités des parties prenantes (marketing, IT, commerce). Les décisions clés, comme le choix du CRM, ont été prises sans consultation.
- Manque de rôles définis : sans cadre clair, les équipes ne savaient pas qui était responsable de quoi. Les conflits internes ont freiné l’avancement, faute de mécanisme d’arbitrage structuré.
- Communication déficiente : sans reporting structuré ni tableaux de bord, les risques critiques – notamment un dépassement de 30% du budget – n’ont été détectés qu’à un stade avancé, rendant les corrections impossibles.
- Circuits décisionnels paralysés : l’absence de comités formels (COPIL, COPROJ) a provoqué des escalades inutiles vers la direction générale et des retards dans les décisions stratégiques.
- Démobilisation des équipes : le manque de leadership structuré et d'orientations claires a progressivement réduit l'engagement des collaborateurs, aggravant les retards et les tensions.
- L’issue incontournable : le projet est abandonné après 12 mois, avec seulement 40% du périmètre réalisé et un dépassement budgétaire de 50%. Ce fiasco révèle une faille majeure : l’absence de gouvernance structurée.
Bien que les chiffres exacts varient selon les études, on peut raisonnablement estimer qu’au moins 30 à 50% des projets échouent ou rencontrent des difficultés significatives en raison d’une gouvernance insuffisante ou inexistante.
Chez d²X, nous apportons une attention forte à la gouvernance et avons d’ailleurs décidé d’en faire une practice à part entière.
Découvrez ou redécouvrez, les fondamentaux pour structurer, piloter et valoriser vos initiatives stratégiques avec efficacité. D’après Thierry Julienne, notre practice leader de la gouvernance Projet.
Comprendre la notion de gouvernance projet
Il s’agit d’un vaste sujet. Si vaste que l'on a souvent tendance à vouloir y inclure bon nombre de sujets sans les relier logiquement entre eux, jusqu'à s'y perdre et à en oublier les principes fondamentaux.
Reprenons les bases.
Selon le Project Management Institute (PMI), la gouvernance de projet fait référence aux cadres, aux fonctions et aux processus qui guident les activités de gestion de projets, programmes et portefeuilles. La gouvernance facilite les orientations, la prise de décision et la supervision des projets.
Elle comprend :
- Les fonctions : le rappel de toutes les fonctions des parties prenantes au projet.
- Les rôles et responsabilités des intervenants au sein de chaque processus et activité (RACI).
- Le cycle de vie du projet : cadre qui guide le déroulement du projet depuis son initiation jusqu'à sa clôture. Il permet de structurer le projet en différentes phases, facilitant ainsi le suivi, le contrôle et la gestion du projet.
- Les processus de l'entreprise : processus opérationnels de réalisation, processus de pilotage, de support et d'évaluation. Le lien avec l'organisation permanente qui reçoit le résultat du projet.
- La communication et le reporting : via des tableaux de bord qui permettent de synthétiser les informations liées à un projet, d'en extraire les tendances principales, et de constituer une base à la prise de décision.
- Les méthodes et outils de gestion de projet : par exemple, l'utilisation d'un logiciel de réservation et de saisie des temps.
- La comitologie : instances de gouvernance
L'ensemble des éléments constitutifs de la gouvernance ci-dessus sont autant de leviers efficaces pour sécuriser le bon déroulement des projets : respect du budget, des délais, du périmètre, de la qualité et obtention de la satisfaction client (et/ou sponsors, utilisateurs).
En synthèse, ce qu’il faut retenir des effets de la gouvernance Projet :
- Assurer le bon déroulement des activités, leur continuité, leur prédictibilité et leur pérennité.
- Fluidifier la circulation de l'information entre les acteurs.
- Faciliter la prise de décisions.
- Organiser la comitologie des projets (création et suivi des comités, communication entre les instances, définition des mandats et des parties prenantes).
- Faire remonter les risques liés aux projets le plus rapidement possible en vue d'alerter les chefs de projet et les décideurs.
- Garantir la traçabilité (décisions prises, orientations définies, solutions choisies, plans d'actions validés et mis en œuvre, événements et jalons-clés du projet...).
Schéma illustrant les fondamentaux de la gouvernance projet.
Les leviers d’une gouvernance efficace ?
Les bases de la gouvernance rappelées, voyons comment les appliquer à bon escient pour en assurer son plein succès.
- Se poser les bonnes questions avant et lors de la mise en place de la gouvernance.
- Quels sont les contraintes propres au projet et aux différents acteurs ?
- Quels sont les sujets à couvrir ? Qui sont les décideurs ? Quelles décisions devront être prises ? A quel rythme ?
- Quels sont les niveaux de pilotage à identifier ? Quel est le mode de fonctionnement des comités ? Quels sont les entrants et les productions ? Quels participants ? A quelles fréquences ?
- Comment superviser la comitologie ? Combien d'ETP sont sollicités ? Comment optimiser la participation des acteurs et simplifier les circuits de prise de décisions ?
Cette liste de questions non exhaustive est à compléter au regard du contexte spécifique de chaque projet.
- Susciter l'adhésion de l'ensemble des parties prenantes au projet.
En effet, comme tout capitaine qui mène un navire, le chef de projet a besoin de l'engagement de ses équipiers pour avancer. Ainsi, bien que la définition et la mise en place de la gouvernance relève de la responsabilité du chef de projet, il est indispensable d'y associer l'ensemble des acteurs. Cela permet de :
- Tenir compte des contraintes propres à chacun.
- Considérer les contraintes propres à l'entreprise et au contexte projet.
- S'assurer que les rôles et les responsabilités sont clairement définis.
- Créer une émulation et favoriser l'implication et la participation active des acteurs.
- Obtenir l'appui du sponsor projet.
Le support de la démarche de définition et de mise en place de la gouvernance par le sponsor projet permet de renforcer l'implication des acteurs ainsi qu'une prise de décision rapide. Cependant, il convient de garder à l'esprit que le sponsor ne doit pas constituer un point d'entrée unique et que la gouvernance est un sujet à traiter de manière collective et participative.
L’importance de la comitologie
La comitologie comprend l'ensemble des instances qui régissent le fonctionnement des comités dédiés à la conduite des projets/programmes.
On dénombre au moins 5 instances, essentielles et présentant une hiérarchie.
- Comité stratégique (COSTRA) ou comité programme (COPROG) : ce comité met en place et suit un plan d'action visant à coordonner les activités des parties prenantes de l’ensemble des projets constituant le programme. Dans ce cadre, il examine, approuve et synchronise les plans stratégiques de l'ensemble des intervenants. Il formule des recommandations et fournit des conseils au sponsor pour lui faciliter les prises de décision rapides. Il donne une vision panoramique des projets.
- Comité de pilotage (COPIL) : il s'agit de l'une des instances de pilotage les plus répandues. Son objectif principal est de partager de la visibilité et de donner les orientations permettant d'assurer la livraison du projet dans les délais et le budget impartis et avec le niveau de qualité attendu.
- Comité de projet (COPROJ) ou comité opérationnel (COMOP) : cette instance a une dimension plus opérationnelle et se concentre sur la coordination et l'accompagnement des équipes opérationnelles en vue d'assurer le bon déroulement du projet. Il est responsable du suivi et des décisions opérationnelles et fonctionnelles, et ne remonte au COPIL que certains arbitrages. Il est garant de la qualité des livrables, de la disponibilité des ressources, du timing et donc de l'attribution et de la priorisation des tâches de l'équipe projet.
- Comité technique (COTECH) : ce comité se concentre sur les questions techniques relatives au projet. Son objectif principal est d'aider les autres instances à s'affranchir du suivi de ces questions, qui généralement dépassent la portée ou l'expertise de personnes non techniques qui font parties des COPIL et COPROJ. Il analyse les risques techniques et les remonte en COPROJ.
- Comité de run (CORUN) ou comité release (COREL) : souvent créé dans les projets IT, le CORUN (ou COREL) est le comité de suivi des activités de maintenance. Ce comité est garant de la maintenance de l'ensemble des versions (releases) du projet. Il soutient et oriente l'équipe projet sur les choix techniques et stratégiques pour l'adaptation des évolutions, le déploiement et la migration des livrables exécutables.
Pour que la gouvernance soit efficace, la fluidité de partage des informations ad’hoc entre ces différents comités est essentielle : elle garantit en effet une bonne réactivité et les prises de décision aux bons moments.
Schéma illustrant les instances de gouvernance mises en place pour un projet s'inscrivant dans le cadre d'un programme comprenant 3 projets.
Evaluer la maturité de sa gouvernance projet
Lorsque nous intégrons un projet ou que nous reprenons son pilotage, la comitologie est le plus souvent déjà en place. Il est important de prendre le temps d’analyser et cerner les objectifs de chaque instance, au-delà de leur dénomination, souvent variable d’une entreprise à l’autre et de veiller à leur bonne coordination.
Nous vous proposons 5 étapes pour établir la maturité de la gouvernance et identifier les axes d’optimisation de cette dernière.
- Prenez le temps de reparcourir les spécificités de votre projet et les attentes des parties prenantes. Réidentifiez les contraintes et les défis à relever.
- Listez vos comités existants et vérifiez leur rôle, leur périodicité, et la liste des participants. Le cas échéant procédez aux ajustements nécessaires
- Faîtes une revue des supports de présentation que vous produisez dans le cadre de vos instances, et procédez à d'éventuelles optimisations.
- Identifiez les décideurs et évaluez l'efficacité et la fiabilité des prises de décisions.
- Analysez la pertinence de vos tableaux de bord et ajustez ce qui vous semble nécessaire.
Envie d’en savoir plus, contactez nous !
Merci à Thierry JULIENNE et Amandine DRIENCOURT pour cet article.